Borda

Publié le 8 octobre 2025 à 14:35

© Sammi Landweer

 

 

07/10/2025, La Comédie de Clermont

La chorégraphe brésilienne Lia Rodrigues revient avec un nouveau spectacle pour 9 danseureuses. Borda explore ses différentes définitions, broderie, fantasme, frontière, à travers une danse-performance puissante, collective, étrange et loufoque.

 

Chorégraphie : Lia Rodrigues

Dansé et créé en collaboration avec : Leonardo Nunes, Valentina Fittipaldi, Andrey da Silva, David Abreu, Raquel Alexandre, Daline Ribeiro, João Alves, Cayo Almeida, Vitor de Abreu

Dramaturgie : Silvia Soter

Collaboration artistique et images : Sammi Landweer

Création lumières : Nicolas Boudier

Durée : 1h10

Production : Lia Rodrigues Companhia de Danças

De la lenteur à la joie

 

Sur la scène restaurée de la Salle des Possibles, le plateau s’éclaire petit à petit d’une lumière froide, révélant une masse informe de plastique blanc. Dans un silence relatif, cette mer de plastique et son horizon d’interprétations prend vie, dans une lenteur extrême, et laisse doucement place à des créatures étranges, derrière lesquelles se cachent les danseureuses. Qui sont ces personnages minuscules sous leur costume de plastique et de tissus ? D’où viennent-ils ? Que racontent-ils ? L’espace de sens et de signification est en fait laissé à la libre disposition du public, tandis que les créatures-danseureuses se lancent, lentement, dans une trajectoire incertaine, jusqu’à l’explosion.

 

Le spectacle Borda semble être construit en dualité. Un premier espace lourd de sens se forme et se déforme au gré du mouvement lent du plastique et des tissus, qui semblent peser tout leur poids sur les épaules des danseureuses. A la fois décors, puis accessoires et costumes, cet amas blanc aux textures et sons très particuliers apparaissent d’abord comme un ou des monstre(s) difformes et terrifiants, avant de se métamorphoser dans l’alternance du mouvement à la fois collectif et propre à chacun.e des membres qui les composent. Les monstres prennent un visage, deviennent des créatures étranges presque timides, puis des personnages presque venus d’un autre monde, à l’allure parfois de voyageur.euses, de travailleur.euses, de migrant.es peut-être ? En tout cas, iels semblent former une communauté unie, avec son langage trouble, ses rituels bien à elle. Iels nous rappellent un microcosme en marge, « au bord », à la frontière de la société – d’ailleurs, où est-elle, cette société ? A-t-elle disparu ? Est-ce nous, qui regardons ces inconnu.es derrière la frontière scène-salle ?

 

Puis, après une traversée de plus en plus bruyante, mouvante, changeante, le spectacle bascule. Alors que la mer de plastique semblait les avoir englouti.es, nos personnages rejaillissent tels des phoenix de tissus. Et soudain, une musique s’élève et les corps se lèvent, quittent le sol et leur prison de plastique, s’émancipent qu’iels avaient établis pour en inventer d’autres. Iels quittent l’entre-soi pour s’avancer jusqu’au bord de la scène pour nous confronter, nous affronter du regard. Et quel regard ! Dès le début de Borda, les danseureuses fascinent avec leur visage ultra expressif, aux grimaces loufoques, rieuses, dramatiques. De vrais visages dansants ! Entre la musique qui gronde et la joie qui déborde des corps, la danse se transforme en un défilé carnavalesque décalé et jouissif.

 

La frontière que paraissait évoquer le titre, Borda, n’est finalement pas celle que l’on croit. Elle réside dans un rapport déconstruit et réinventé au réel et au fantasme. Les spectateurices désarçonné.es par cette étrange communauté mouvante, plastique, tissée, ne peuvent que se laisser porter. Et ce qui reste, c’est un espace aux mille possibilités où le public est libre de venir y déposer son imaginer. Au bord de la scène. Aux frontières de notre réalité. Dans un monde où une nouvelle humanité semble renaître et se réinventer.

 

Borda a été présenté en ouverture la 21ème Biennale de la Danse à Lyon.

Plus d'informations sur le spectacle :

Ajouter un commentaire

Commentaires

Il n'y a pas encore de commentaire.